Pourquoi partager sa course du 1er janvier devient-il un cliché ?
Le 1er janvier, une date symbolique qui résonne avec renouveau, bonnes résolutions et, bien souvent, excès alimentaires de la veille. Mais c'est aussi, sur Facebook et Instagram, le théâtre d'une tradition numérique grandissante : publier fièrement son premier "run" de l'année. Une pratique qui divise. Si certains voient dans ces publications une source d'inspiration, d'autres y perçoivent un rituel lassant, voire une compétition voilée. Mais au fond, pourquoi ce besoin irrépressible de partager cette sortie-là, précisément ? Et quel regard derrière nos écrans ?
Laissez-moi vous emmener dans l’ambivalence de ce phénomène.
plaisir ou envie d’être vu ?
C’est un fait : lorsqu’on parcourt les réseaux sociaux le 1er janvier, les posts de coureurs s’accumulent comme des kilomètres sur leur montre GPS. Une sortie matinale à jeun, un selfie avec le soleil levant, et hop, la publication est en ligne. Certes, on peut se féliciter de la motivation — surtout après une nuit parfois trop arrosée —, mais creusons un peu. Partage-t-on vraiment par plaisir ou par désir de reconnaissance ?
On ne va pas se mentir : ces publications ont souvent une composante sociale forte. Montrer qu’on est actif dès le premier jour de l'année, qu'on est "dans le mouvement", peut flatter l'égo. Cela crée aussi une comparaison implicite, même si ce n'est pas toujours conscient : combien de kilomètres as-tu fait ? À quelle allure ? Qui a couru le plus tôt, voire dans les conditions les plus extrêmes ? Une forme de compétition moderne s’installe, non pas sur les sentiers mais sur les fils d'actualité.
Mais alors, publier sa "première sortie" relève-t-il d'une réelle passion pour le sport ou d'une quête d’approbation ? Peut-être un peu des deux. Et c’est là toute la subtilité de ces échanges virtuels : ils oscillent entre sincérité et mise en scène.
courir pour soi, pas pour l’écran
Je me souviens d’un 1er janvier particulièrement glacé dans les Alpes. Pas de connexion à Instagram, seulement mes chaussures, la neige et ce silence unique des montagnes au petit matin. Cette course reste gravée dans ma mémoire, pas parce que quelqu’un l’a vue ou likée, mais parce qu’elle m’a offert ce que chaque passionné de trail recherche : un moment d’intimité avec soi-même et la nature.
Et si c’était ça, le vrai message ? Bien sûr, partager ses exploits peut sembler légitime. Après tout, nous avons tous envie de montrer ce que nous aimons. Mais parfois, cette volonté de partage finit par dénaturer l’intention première. Au lieu de savourer le moment, on pense à l’angle du selfie parfait, à l’impact potentiel sur notre auditoire, ou pire, aux algorithmes. Le sport devient un spectacle, perdant un peu de sa pureté.
Alors pourquoi ne pas essayer, lors de votre prochain "run du 1er janvier", de laisser votre téléphone à la maison ? Juste pour voir. Les réseaux ne disparaîtront pas, mais ce qui est sûr, c’est que ce moment-là, vous, vous ne l’oublierez jamais.
Que l’on soit amateur de course à pied ou simple spectateur de ces myriades de publications saisonnières, ce rituel du "run du 1er janvier" invite à une réflexion plus large. Et vous, pourquoi courez-vous vraiment ? Pour le plaisir, pour le dépassement de soi, pour le partage virtuel ? Il n’y a pas de réponse unique, mais il est essentiel qu’elle vous appartienne. Alors, chaussez vos baskets, trouvez votre chemin, et laissez les kilomètres parler pour vous — ou pas.
Bonne année à tous, et surtout, bonne course au-delà des likes et commentaires.

